Johann Grondin : de Chuí à l’Oiapoque, l’homme qui traverse le Brésil à pied
Une aventure humaine et solidaire
Si la marche est longue, ce sont surtout les rencontres qui rythment le voyage. Dans chaque État, Johann a été accueilli par des familles, des fermiers, des pêcheurs ou des randonneurs souvent étonnés par son projet :
« Dans les coins reculés, les gens me regardent comme un extraterrestre. Ils pensent que j’ai eu un problème avec ma moto ! Mais dès que j’explique, tout s’ouvre. »
Au fil des kilomètres, il a découvert la solidarité rurale brésilienne : « Souvent, je dors chez l’habitant. Les gens se préviennent de ferme en ferme, et je suis accueilli comme un ami. »
Dans les zones isolées, il s’annonce systématiquement aux autorités locales pour éviter tout malentendu :
« Parfois les habitants ont peur des bandits. Si tu arrives sans prévenir, certains sortent l’arme avant de te dire bonjour... Mais dès qu’ils comprennent, tout va bien. »

Cette bienveillance quotidienne l’a souvent aidé à tenir. « L’être humain est au cœur de cette aventure », résume Johann. Les gestes simples – un verre d’eau, un repas partagé, un abri pour la nuit – deviennent les plus beaux souvenirs. Sur les réseaux, sa page Jow Must Go On rassemble une communauté de marcheurs et de curieux qui suivent sa progression et lui envoient des encouragements. « Quand je doute, je pense à ceux qui me suivent. Ils me donnent de la force. »
Marcher pour réapprendre à vivre
Pour Johann Grondin, cette traversée est aussi un voyage intérieur. « Je passe dix heures par jour à penser à la vie. C’est une aventure externe, mais aussi une aventure interne », confie-t-il. Face à la fatigue, la solitude, les blessures et la chaleur, il a appris à écouter son corps et à apprivoiser ses peurs. « Le plus dur, c’est de faire le premier pas hors de ta zone de confort. Cela étant, tu t’adaptes. »

Son message dépasse la marche : il veut rappeler que la lenteur, l’effort et la nature font partie de notre humanité. « L’Homme moderne a passé 99 % de son histoire à marcher. Dans notre code génétique, on est faits pour être nomades », aime-t-il rappeler lors de ses conférences. Pour lui, l’essentiel n’est pas d’accomplir un record, mais de réapprendre à vivre simplement :
« Aujourd’hui, les gens ont peur de tout : peur du soleil, peur de la route, peur de manquer d’eau… Moi, je montre qu’on peut s’adapter. »
À 47 ans, il se définit comme un homme ordinaire qui a osé un rêve extraordinaire. « J’ai 47 balais, et j’ai traversé le Brésil à pied. » Une phrase simple, mais qui en dit long sur la force tranquille de celui qui, fin décembre, passera sur le pont de l’Oyapock bouclant ainsi la plus longue marche au Brésil, et peut-être l’une des plus belles leçons d’effort et d’humanité.