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Finances de la mairie de Kourou : les explications de François Ringuet et Jean-Étienne Antoinette

À Kourou, les finances communales font débat. La Chambre régionale des comptes a révélé un déficit de plus de 17 millions d’euros pour l’exercice 2024, bien au-delà des comptes présentés par la mairie. Le maire François Ringuet tente de rassurer et promet une régularisation rapide. Mais à cinq mois des élections, l'ancien maire et candidat au prochain scrutin Jean-Étienne Antoinette contre-attaque et l’accuse de dissimuler la réalité aux Kourouciens.

  • Par: adminradio
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Déficit à Kourou : le maire François Ringuet s’explique

Le jeudi 23 octobre 2025, nous avons reçu François Ringuet, maire de la commune de Kourou, pour lui donner l’occasion de commenter l’avis rendu par la Chambre régionale des comptes (CRC) qui pointe un déficit de plus de 17 millions d’euros pour le budget principal 2024 — presque trois fois supérieur au montant annoncé initialement par la mairie.

Selon les magistrats de la CRC, ce gouffre s’explique notamment par « des dépenses de fonctionnement non maîtrisées et des recettes inférieures aux prévisions ». De plus, la CRC juge que le budget 2025 n’est « pas en équilibre réel »

Ce à quoi le maire actuel répond que la cause profonde de l’écart ne se limite pas à la mauvaise estimation des recettes ou aux dépenses excessives, mais aussi à des subventions qui n’auraient pas été encaissées faute de remplissage des conditions et de preuves d'achèvements des travaux. La CRC aurait ainsi relevé que les documents nécessaires pour déclencher les versements n’avaient pas été transmis. Une confusion administrative, selon le maire :

«Je prends l'école Saba, il n'y a pas caducité, puisque la convention, elle va jusqu'au 31 décembre. On nous parle aussi de l'adressage. Pareil, l'adressage a été diminué et ça sera présenté. D'autres opérations font partie de ces documents qui seront envoyés, puisque ce sont des subventions qu'on avait reçues. Et puis il y a d'autres opérations, comme la toiture, les travaux à la mairie. Donc il y a des opérations qui ont été complètement annulées, pour 500 000 euros. Parfois, la chambre pense que les subventions sont caduques, alors que non, on a les documents, on va les transmettre à la CRC. » explique le maire, précisant que l’administration municipale redouble d’efforts pour reconstituer le dossier.

Dans sa conclusion, la CRC recommande la mise en place d’un nouveau plan de redressement financier pour la commune, car les précédentes recommandations en la matière n'ont pas été observées par la collectivité. Une perspective que le maire accueille avec confiance malgré les défis :

" Le vrai problème d'une commune, c'est la masse salariale. C'est ce qui bloque, en général, les collectivités, parce que la masse salariale, tu ne peux pas dire que demain matin, t'arrêtes de payer les salaires. La masse salariale à Kourou, quand nous sommes arrivés, était quasiment à 80%. Nous sommes passés de 900 agents aujourd'hui à 610 agents au sein de la collectivité. [...] Nous avons une politique de non-remplacement des départs à la retraite. Nous avons une trajectoire aujourd'hui, qui est en avance par rapport à la trajectoire de la CRC."

L’enjeu est de taille : Kourou, ville du spatial et de l’industrie guyanaise, ne peut se permettre un déséquilibre budgétaire à répétition, notamment à cinq mois des élections municipales. Le maire affirme que les grands projets 2020-2026 restent sur les rails, et que la gestion rénovée de la commune continue de se faire par une optimisation des dépenses et une vigilance accrue sur les recettes.

Réponse de l’ancien maire Jean‑Étienne Antoinette

Une posture qui se veut rassurante mais qui ne semble pas convaincre l'opposition. En réaction à l’intervention de François Ringuet, l’ancien maire de Kourou, Jean-Étienne Antoinette, qui a dirigé la commune de 1996 à 2014, a pris la parole vendredi 24 octobre pour un droit de réponse. Celui qui a déjà annoncé sa candidature à la mairie pour le scrutin à venir pose un regard critique sur la gestion actuelle : 

"Quand on analyse les recettes de la ville de Kourou, ces recettes ont connu une augmentation de plus de 10 millions d'euros. Sur quel effet ? Les impôts à Kourou ont augmenté par deux phénomènes. Premièrement, il a augmenté en 2015 les taux d'imposition de plus de 25% en 2015. Et, par ailleurs, il y a le phénomène de coefficient de revalorisation de la valeur locative", affirme-t-il, accusant l’équipe municipale en place de « mentir aux Kourouciens ».

Il évoque des pratiques qu’il qualifie de « copains coquins, pour contourner les règles de marché public » et dénonce ce qu’il juge être de l’« incompétence de l’équipe actuelle » :

"[François Ringuet] a fait allusion à titre d'exemple à la subvention de l'ANRU (Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine - ndlr), les 2,5 millions d'euros. Mais là encore, voilà une incompétence de cette commune. Kourou était avec Cayenne et Matoury, les trois communes qui avaient su défendre et obtenir des subventions importantes en matière de la politique de rénovation urbaine. Vous savez que Kourou est la seule ville qui n'a pas su renouveler son PRU ! La seule ville de Guyane, quand Saint-Laurent, elle-même s'est inscrite dans le dispositif. 

Et donc c'est normal qu'on demande à Kourou de rembourser les sommes parce que les travaux n'ont pas été achevés, il n'a pas su encore une fois, ou pour des raisons stratégiques, ou par la bêtise électoraliste, il n'a pas su terminer le centre d'accueil. Il a laissé périr, à titre d'exemple, le centre artisanal Bushinengué.", conclut l'ancien édile.

Pour Antoinette, l’avis de la CRC est un élément alarmant, qui se rajoute à ce qu’il avait déjà dénoncé par le passé. Dans une interview donnée en mai 2024 à France Guyane, l'ancien maire énumérait notamment une perte d’attractivité de la ville, une érosion de la population, et une dépendance excessive à l’économie du spatial. 

Il estime que la situation financière est le reflet d’un malaise plus profond, et que l’élection à venir pourrait être un moment de bifurcation pour la commune.